AVIS: Le secret de la police française a encouragé les théories du complot sauvages sur la mort de la princesse Diana et d'Al-Hilli

Hommages floraux à la princesse Diana et Dodi Al-Fayed près du Pont de l’Alma à Paris. Photo de Patrick KOVARIK / AFP

Mercredi est le 25e anniversaire de l’accident de la route qui a tué la princesse Diana et Dodi Al-Fayed à Paris. Lundi prochain, c’est le 10e anniversaire des meurtres d’Al-Hilli dans les Alpes françaises.

Quel est le point commun entre ces deux événements, autre que la proximité de leurs dates ?

Ils sont tous les deux – encore – l’objet de théories complotistes sauvages.

Dans les deux cas, si vous regardez les faits incontestés, les possibilités sont limitées. L’accident de Diana ne pouvait être qu’un accident. Les meurtres d’Al-Hilli étaient presque certainement un acte aléatoire commis par quelqu’un de la région.

Aucune de ces explications n’est satisfaisante pour une partie des médias populaires – en France comme en Grande-Bretagne. Les notions sauvages prospèrent toujours.

J’ai signalé les deux événements à l’époque. Je les ai étudiés en détail. La séquence des événements rend toute forme d’assassinat impossible (dans le cas de la mort de Diana et Dodi) ou extrêmement improbable (dans le cas des meurtres d’Al-Hilli).

Dans les deux cas, les enquêteurs français ont été critiqués dans les médias britanniques. Y a-t-il du vrai dans les critiques ? Un peu; pas beaucoup.

Ce qui est certainement vrai, c’est que les deux événements ont illustré l’énorme fossé entre la manière dont les enquêteurs français et anglo-saxons traitent les médias.

En théorie, chaque partie à une enquête pénale française est secrète une fois qu’elle est transmise à un juge d’instruction oujuge d instruction. Dans l’affaire de l’accident du Diana en 1997, le juge d’instruction, Hervé Stéphan, a pris ce principe au sérieux. Au cours des deux premières semaines, très peu d’informations, au-delà des faits de base, ont été données aux médias mondiaux réunis à Paris.

Avec un collègue de la BBC, Hugh Schofield, j’ai écrit au juge Stéphan à l’époque. Nous avons dit que nous comprenions le système français, mais s’il n’autorisait pas la publication des conclusions officielles, mille théories du complot se multiplieraient.

Il a répondu pour dire, en fait : « Vous avez absolument raison, mais j’ai les mains liées. Les règles sont les règles.”

Au moment des meurtres d’Al-Hilli 15 ans plus tard, il me semblait que les autorités judiciaires françaises avaient tiré les leçons de la débâcle informatique dans l’affaire Diana. Le procureur général d’Annecy, Eric Maillaud, donne régulièrement des conférences de presse. Certains des principaux gendarmerie les enquêteurs ont participé.

Même ainsi, les informations étaient limitées et étrangement filtrées. Il a fallu une grosse fuite au Monde en novembre (deux mois après l’événement) pour établir la chronologie de base de ce qui s’est passé dans une aire de repos forestière près du village de Chevaline le 5 septembre 2012.

Encore une fois, l’absence d’informations fondamentales a permis à des théories farfelues de s’imposer.

Prenons d’abord l’accident de Paris. Il existe certaines zones d’incertitude. Une Fiat blanche qui a heurté la limousine de Diana et Dodi n’a jamais été retrouvée. Mais les faits incontestés rendent impossible que quiconque ait organisé une tentative d’assassinat et l’ait déguisé en accident.

L’itinéraire emprunté par Diana et Dodi cette nuit-là était aléatoire. Ils essayaient de secouer les paparazzis à moto qui les poursuivaient depuis l’hôtel Ritz. Plutôt que de retourner directement à l’appartement de Dodi juste à côté des Champs Elysées, ils ont fait un grand détour par la voie rapide quais au bord de la Seine.

Leur chauffeur était le pire pour l’alcool et la drogue. Il s’éloignait en fait de l’appartement de Dodi lorsqu’il s’est écrasé contre un pilier dans le tunnel sous la place de l’Alma.

Comment quelqu’un – M16, CIA ou la famille royale – aurait-il pu savoir que leur limousine se serait trouvée à cet endroit à ce moment-là ?

Maintenant, les meurtres d’Al-Hilli.

Toutes sortes d’informations intrigantes ou suspectes ont été déterrées par les médias sur les trois victimes : Saad Al-Hilli, 50 ans, sa femme Iqbal, 47 ans, et sa mère Suhaila Al-Alaf, 74 ans. Des théories similaires ont été avancées pour suggérer que la véritable cible des meurtres était Sylvain Mollier, 46 ans, le cycliste local retrouvé mort à côté de la voiture de la famille anglo-irakienne.

Les Al-Hillis et Mollier ont pris des décisions au hasard ce jour-là pour conduire ou faire du vélo jusqu’au bout d’une route sinueuse et cahoteuse de 3 kilomètres dans les forêts et les montagnes au-dessus du lac d’Annecy.

Les témoins n’ont vu aucun signe indiquant qu’ils étaient suivis. Il est difficile d’imaginer comment un meurtrier – tueur à gages dans le cas des Al-Hillis ; quelqu’un avec une rancune personnelle dans le cas de Mollier – aurait pu les guetter dans cet endroit isolé à 15h30 cet après-midi-là.

Les preuves médico-légales trouvées sur les lieux suggèrent que le tueur était là quand ils sont arrivés. Il identifie également l’arme utilisée comme un P06 Luger de 70 ans (au moins) de 7,65 mm, délivré à l’armée et à la police suisses jusqu’à la fin des années 1930. Ce n’est pas l’arme de choix d’un tueur à gages.

Après avoir consciencieusement suivi toutes les pistes possibles sur les activités commerciales de Saad Al-Hilli en tant qu’ingénieur microsatellite et sa querelle avec son frère au sujet du testament de leur père, les enquêteurs français sont depuis longtemps parvenus à une conclusion de travail. Les meurtres étaient un acte aléatoire commis par un homme dérangé de la région, qui est mort depuis ou qui est toujours couché.

Conclusion : la politique française du « secret de l’enquête » encourage les interprétations sauvages, et l’invention pure, à prospérer. Vingt-cinq et dix ans plus tard, la mémoire collective et populaire – notamment de l’accident de la route de la princesse Diana – retient les théories farfelues. Il est souvent flou sur les faits.