Les supermarchés français ouvrent des

Plusieurs chaînes de supermarchés françaises ont mis en place des caisses à chat. Photo de THOMAS SAMSON / AFP

Elle choisit toujours la même caisse, celle où les clients sont encouragés à s’attarder et à discuter en s’installant.

Ici, au magasin Hyper U de Nantes, dans l’ouest de la France, ils ont un nom officiel pour la caisse désignée : Bla Bla Caisse (Chitchat checkout).

Un panneau bleu indiquant “ici on prend son temps” encourage ceux qui ont du temps à s’attarder et à discuter, et incite ceux qui n’en ont pas à payer à une autre caisse.

“Je parle de tout et de rien, par exemple de mes petits-enfants qui viennent pour les vacances”, dit Gisele, vêtue d’une élégante veste bleue avec un col en fourrure et serrant un sac rouge, une baguette sous le bras.

À l’exception des vacances scolaires, lorsqu’elle a de la compagnie, les déplacements quotidiens de Gisele vers Hyper U sont sa seule chance de voir des gens, dit-elle, donc “s’habiller” pour l’occasion est logique.

“J’avais l’habitude de jouer au bridge dans un club, mais à cause de Covid, je n’ai plus vraiment envie d’y aller”, dit-elle.

Derrière la caisse, Rozenn Charpentier, 52 ans, scanne les courses tout en écoutant une cliente d’une soixantaine d’années se plaindre d’avoir reçu une contravention alors qu’elle “n’était pas garée si illégalement”.

Un client d’une soixantaine d’années est de meilleure humeur, car il vient de gagner 150 € dans un jeu de grattage.

Deux adolescents, pendant ce temps, achètent des pistolets jouets à plomb. “Faites attention avec ceux-là”, les avertit Charpentier.

“Au comptoir “bla bla”, je me sens libre d’entamer une conversation, les gens sont généralement heureux de parler”, dit-elle.

Les caissières du magasin se relaient au comptoir de bavardage, sur la base du volontariat.

Le supermarché a ouvert la caisse lente il y a deux ans pour “relancer le contact humain” avec les clients après la mise en service des six comptoirs libre-service du magasin, a déclaré Régis Defontaine, responsable de la communication et des événements du supermarché.

“Il n’y a rien de particulièrement original à ce que les clients et les vendeurs aient une conversation. Mais aujourd’hui, on perd ce lien social et certains disent que c’est dommage. Nous ne sommes pas chez Amazon”, a-t-il déclaré, en référence au détaillant en ligne américain.

Les clients qui choisissent la file d’attente du chat sont généralement âgés, vivent souvent seuls et ont tout leur temps, a-t-il dit.

D’autres marques nationales d’hypermarchés, comme Auchan et Carrefour, ont maintenant des installations similaires.

“Certains clients aiment prendre leur temps et discuter”, explique Pierre-Emmanuel Vasseur, directeur du magasin Carrefour Angers Grand Maine.

Ici, cela fait un peu plus d’une semaine que la première caisse de bavardage a ouvert, avec des clients à la fois curieux et mystifiés par cette nouveauté.

“De quoi sommes-nous censés parler ?” demande un homme d’une soixantaine d’années aux cheveux gris bien coiffés et à la chemise impeccable.

Une femme a demandé avec empressement : “Avons-nous une limite de temps ?”

“Puisque je suis censé bavarder avec vous, laissez-moi vous dire que je vous trouve charmante”, a dit un homme à la jeune caissière.

Juste derrière lui, un autre client a des doutes : “Je ne suis pas un bon parleur”, dit-il, avant de pousser son chariot dans la direction opposée.

Pas de telles hésitations pour Marie-Luc Lefeuvre-Justeau, une habituée de 82 ans, qui dit aimer discuter quand elle fait ses courses.

“Le problème, c’est qu’habituellement, quelqu’un va se plaindre parce qu’il est pressé”, dit-elle. “Mais ici, on ne dérange personne”.