Du football aux pâtisseries du petit-déjeuner, la France recèle de féroces rivalités locales qui se jouent principalement par les mots et la gastronomie, mais qui débordent parfois sur des batailles physiques. Voici quelques-uns des voisins qui aiment se détester.

Les Français entretiennent une relation d’amour-haine avec nombre de leurs voisins proches, mais c’est souvent envers leurs concitoyens qu’ils sont le plus en colère. Voici quelques-uns des conflits dans lesquels vous ne devriez vous aventurer qu’avec prudence.

Lille et Lens à propos du football

Six personnes ont été blessées lors d’affrontements entre supporters lors du Derby du Nord opposant le Racing Club de Lens et le LOSC Lille le week-end dernier. Les supporters lensois ont dévoilé une pancarte insultante où l’on pouvait lire “Lillois merda”, avant d’envahir le terrain pour affronter les fans lillois, dont certains avaient lancé des projectiles dans la direction opposée, selon La Voix du Nord.

Bien que situées dans des départements différents, Lens (Pas-de-Calais) et Lille (Nord) sont séparées par moins de 40 kilomètres, mais leur antagonisme féroce est souvent dépeint comme un choc des cultures – la ville ouvrière de Lens a été durement touchée par la fermeture des mines de la région, tandis que Lille est considérée comme une ville plus bourgeoise et cosmopolite – même s’il s’agit certainement d’une généralisation.

La rivalité a été alimentée par les fortunes diverses des deux clubs de football au fil des ans, Lille ayant plus récemment pris l’ascendant sur ses rivaux après la domination de Lens dans les années 1990.

Lyon et Saint-Etienne également sur le football

Les supporters de Saint-Etienne brandissent des banderoles sur lesquelles on peut lire “Mort à Lyon”. Photo : PHILIPPE DESMAZES / AFP.

60 kilomètres séparent ces deux villes de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Leur rivalité est surtout connue pour les tensions entre leurs clubs de football respectifs mais, comme pour Lille et Lens, l’acrimonie a des racines culturelles plus profondes.

Après la révolution française, Saint-Etienne a commencé à se développer et à rivaliser avec son grand voisin. Cela a créé une certaine jalousie, “d’autant plus qu’il y avait un élément symbolique de la ville sale battant la ville riche”, a déclaré le sociologue et écrivain Jean-Noël Blanc au Progrès.

Cependant, les inégalités persistent, notamment dans l’industrie textile stéphanoise, où “beaucoup d’acheteurs venaient de Lyon, ce qui n’était pas très bien perçu”, ajoute-t-il.

Il existe également une très ancienne rivalité en matière de football – selon Le Progrès, un match contre l’Olympique lyonnais de Villeurbanne en 1936 s’est terminé par une bagarre, l’arbitre a dû être évacué, et un directeur lyonnais s’est enfui avec tout l’argent du match pour que Saint-Etienne ne gagne rien.

Normandie et Bretagne autour du Mont-Saint-Michel (et du cidre)

Le Mont-Saint-Michel est officiellement en Normandie. Photo : Sameer Al-DOUMY / AFP.

Toutes les rivalités françaises ne sont pas aussi violentes que les bagarres de football, mais ce serait une erreur de les prendre à la légère. C’est le cas de la Bretagne et de la Normandie, qui représentent à elles deux une partie importante de la côte nord de la France. Et c’est une portion de ce littoral qui a constitué l’un des principaux points de discorde entre elles. Plus précisément, le Mont-Saint-Michel, qui a parfois été un véritable champ de bataille entre les deux camps.

Le site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO est officiellement en Normandie, mais les Bretons aiment aussi revendiquer l’île. Le conflit a atteint son paroxysme en 2018, lorsque le maire de la ville a tenté d’ériger un drapeau breton aux côtés de ceux de la Normandie et de la France, mais a été contraint de le retirer à la suite de plaintes.

Bien sûr, la France étant ce qu’elle est, la rivalité se joue aussi à la table du dîner. Non seulement les deux populations ne s’entendent pas sur la question de savoir qui fabrique le meilleur cidre, mais elles s’opposent également sur la question de savoir si le cidre est servi dans un verre en Normandie ou dans un verre traditionnel en Bretagne. bolée (bolée).

Sud-ouest et partout ailleurs sur les pâtisseries

En parlant de nourriture et de boisson, les pâtisseries françaises ont longtemps alimenté le débat le plus féroce de tous : ?

On a souvent l’impression que la France est divisée en deux sur le nom à donner à cet en-cas du petit-déjeuner, mais en réalité, seuls les habitants du sud-ouest de la France préfèrent le terme de “pâtisserie”. chocolatine.

Malgré tout, pour beaucoup, le mot en est venu à représenter leur identité régionale, et les personnes de chaque côté du débat défendront farouchement leur camp. Une chose sur laquelle tout le monde est d’accord, c’est qu’ils sont délicieux.

Toulouse, Carcassonne et Castelnaudary autour du cassoulet

Ce que nous avons ici est une rare rivalité à trois entre ces villes du sud-ouest de la France. Bien sûr, il ne peut s’agir que d’une dispute sur la nourriture. La raison ? Elles prétendent toutes être à l’origine du meilleur : un ragoût copieux contenant de la viande et des haricots.

Chaque région a sa propre recette traditionnelle : in Castelnaudary, on utilise de l’oie ou du canard pour la viande, à Toulouse c’est de la saucisse ou du mouton, et quand c’est la saison, les restaurants de Carcassonne ajoutent de la perdrix.

Nous ne savons pas comment les habitants ont l’énergie pour se disputer après avoir mangé un cassoulet délicieux et rassasiant, mais certains ont essayé de rassembler les gens. Le chef français Prosper Montagné a tenté un jour de réconcilier les trois villes en une sainte trinité de recettes de cassoulet : Castelnaudary le Père, Carcassonne le Fils, et Toulouse le Saint-Esprit.

Mention spéciale aux Bourguignons et aux Bordelais, ainsi qu’à tous ceux qui ont choisi un camp, pour avoir soigneusement entretenu un ressentiment mutuel similaire pour savoir qui fait le meilleur vin.

L’Alsace et la Lorraine au fil de l’histoire

Vous pourriez penser que l’Alsace-Lorraine est une entité unique, avec des souvenirs de votre professeur d’histoire vous racontant comment la région historique a été rendue à la France par l’Allemagne en 1918 dans le cadre du Traité de Versailles, mais, comme des frères et sœurs qui ne s’entendent pas, ce sont souvent les personnes ayant le plus en commun qui se détestent le plus.

L’animosité entre ces deux-là remonte à des centaines d’années, peut-être à 1525, a déclaré l’historien Bernard Vogler à France 3, lorsque le duc catholique de Lorraine a envoyé son armée pour écraser une révolte de paysans protestants, tuant 30 000 Alsaciens. Selon Vogler, la situation s’est inversée lors de l’annexion allemande de la région entre 1871 et 1918, lorsque les Allemands ont donné les meilleurs emplois aux protestants, laissant ceux de Moselle dans le nord de la Lorraine “se sentir comme des citoyens de seconde zone”.

Et nulle part ailleurs la réforme régionale de 2015 de François Hollande n’a été plus fermement opposée que dans cette partie du pays, avec l’Alsace, la Lorraine et la France. Champagne-Ardenne fusionnant pour devenir la nouvelle région Grand Est. En janvier 2021, les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin ont fusionné pour créer la Collectivité européenne d’Alsace, récupérant ainsi en quelque sorte leur région historique – bien qu’elle fasse toujours partie du Grand Est, ce mouvement montre l’importance durable de l’identité régionale dans l’est de la France.

Le malaise se manifeste également sur le terrain de football lors du “Derby de l’Est” opposant le FC Metz en Lorraine et le RC Strasbourg en Alsace.

Bretagne et Pays de la Loire contre Nantes

Des personnes manifestent pour demander l’unification de la Loire-Atlantique et de la Bretagne en 2016 à Nantes. Photo : JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP.

À l’ouest du pays, un département est au cœur d’un conflit entre deux régions. Historiquement partie de la Bretagne, le département de la Loire-Atlantique a été séparé de la région pendant la Seconde Guerre mondiale par le gouvernement de Vichy, et plutôt rattaché à ce qui deviendra en 1955 la région Pays-de-la-Loire.

À Nantes et dans les régions avoisinantes, les voix pro-bretonnes se sont fait de plus en plus entendre ces dernières années, et en février, le conseil municipal de Nantes a donné son avis aux habitants sur le rattachement de la Bretagne.

Alors que les référendums sur le départ d’une entité plus grande se sont avérés, euh, controversés ces dernières années, 66 pour cent des habitants des Pays-de-la-Loire pensent qu’il serait légitime pour les habitants de Loire-Atlantique de décider de leur sort par référendum, selon un sondage réalisé plus tôt cette année.

Paris et Marseille sur tout (et le football)

Des supporters du PSG tiennent une banderole sur laquelle on peut lire “C’est la guerre !” avant un match contre Marseille en 2018. Photo : GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP.

C’est peut-être la rivalité la plus célèbre de France, les batailles liées au football n’étant que la partie émergée de l’iceberg.

Le Paris Saint-Germain et l’Olympique de Marseille se disputent régulièrement le derby du “Classique”, bien qu’ils soient basés aux deux extrémités du pays. En tant que deux des clubs les plus performants de France, ils ont également des fans dans tout le pays (le président Emmanuel Macron est un fan de longue date de Marseille, bien qu’il soit né à Amiens dans le nord de la France).

Mais la bataille culturelle est bien plus profonde – entre le nord et le sud, entre les deux plus grandes villes de France, entre la riche capitale et la ville portuaire ouvrière, entre les Parisiens chics et les Méditerranéens fougueux.

Ce conflit a également joué pendant la pandémie de Covid-19, avec Marseille contre les mesures sanitaires décidées à Paris, et un microbiologiste local controversé s’imposant comme un héros culte dans la ville méridionale.

Paris et, bien, partout…

Le choc culturel entre Paris et Marseille pourrait être considéré comme une version extrême de la relation que la plupart des Français entretiennent avec la capitale.

“La méfiance à l’égard de Paris n’est pas l’exception, c’est la règle, mais les gens y prêtent plus d’attention quand cela se passe à Marseille parce que cela correspond à leur vision du monde”, Nicolas Maisetti, politologue à l’Université Gustave Eiffel Paris-Est, .

Dans d’autres régions du pays, les Parisiens sont souvent dépeints comme des snobs froids et inamicaux. Ce ressentiment a été exacerbé lors de la pandémie de Covid car de nombreux habitants de la capitale .

Et si le reste de la France déteste Paris, il peut souvent sembler que le sentiment soit réciproque.

Lors de la finale de la Coupe de la Ligue 2008 entre le PSG et Lens, les supporters parisiens ont déployé une banderole sur laquelle on pouvait lire “Pédophiles, chômeurs, consanguins : bienvenue chez les Ch’tis”, en référence au film à succès Bienvenue chez les Ch’tis qui venait de sortir.