Des émeutiers en Corse affrontent la police au sujet du traitement d'un nationaliste emprisonné.

Des émeutiers en Corse affrontent la police après qu’un prisonnier nationaliste ait été agressé en prison. (Photo de Pascal POCHARD-CASABIANCA / AFP)

Le gouvernement français a appelé au calme lundi après de violents affrontements qui ont fait des dizaines de blessés parmi les manifestants et les policiers sur l’île de Corse, où la colère suscitée par l’agression en prison d’une figure nationaliste a atteint son paroxysme.

La police a fait état de 67 personnes blessées lors des manifestations de dimanche, dont 44 policiers, après des scènes que les spectateurs ont décrites comme s’apparentant à une guérilla urbaine.

Yvan Colonna, qui purge une peine de prison à vie pour l’assassinat en 1998 du plus haut fonctionnaire régional de Corse, Claude Erignac, est dans le coma depuis qu’il a été battu le 2 mars en prison par un codétenu, un djihadiste condamné.

L’incident a attisé la colère sur l’île, où certains considèrent encore Colonna – qui n’a été arrêté qu’en 2003 après une chasse à l’homme de cinq ans qui l’a finalement retrouvé vivant comme berger dans les montagnes corses – comme un héros de la lutte pour l’indépendance.

Des manifestations et des émeutes ont lieu depuis l’attaque de la prison, que les manifestants imputent au gouvernement français.

“Assassins du gouvernement français”, pouvait-on lire sur des pancartes lors des manifestations de dimanche, qui ont rassemblé entre 7 000 et 10 000 personnes dans les rues, selon les estimations.

Colonna a été emprisonné dans le sud de la France. Les autorités ont longtemps rejeté sa demande de transfert en Corse, affirmant que son délit faisait de lui un détenu à statut spécial.

Afin d’apaiser les tensions, le Premier ministre Jean Castex a supprimé ce statut la semaine dernière. Il a également déclaré qu’il autoriserait le transfert en Corse de deux autres membres condamnés du commando qui a tué Erignac, mais cette mesure n’a pas réussi à apaiser leurs partisans.

Jusqu’à 300 jeunes manifestants masqués ont utilisé des cocktails Molotov et des pierres contre la police, qui a à son tour déployé des gaz lacrymogènes et des canons à eau lors des affrontements qui ont éclaté dans l’après-midi et se sont prolongés tard dans la soirée.

Le procureur Arnaud Viornery a déclaré à l’AFP que la police avait demandé à la population locale de rester à l’intérieur dans la ville de Bastia, où des manifestants ont incendié le bureau des impôts avec des bombes incendiaires.

Colère et indignation

La Corse, l’une des plus grandes îles de la Méditerranée, est française depuis le XVIIIe siècle.

Elle est connue comme “l’île de beauté” en raison de ses côtes intactes, de ses plages spectaculaires et de son climat doux, qui l’ont rendue populaire auprès des touristes, qui sont la principale source de revenus de l’île.

Mais il y a également eu des tensions constantes entre les nationalistes indépendantistes et le gouvernement central, impliquant des assassinats de fonctionnaires envoyés par Paris, ainsi que des meurtres fréquents entre les factions politiques rivales de l’île.

“Il y a une expression de colère et d’indignation”, a déclaré dimanche Gilles Simeoni, l’ancien avocat de Colonna et un politicien pro-indépendance.

“L’ensemble du peuple corse s’est mobilisé pour protester contre l’injustice et en faveur de la vérité et d’une véritable solution politique”, a-t-il ajouté.

Un manifestant de la manifestation de dimanche, Antoine Negretti, a déclaré : “Toute violence sera la faute du gouvernement français.”

Sept années de négociations n’ont donné aucun résultat, a déclaré le jeune homme de 29 ans.

“Mais les choses ont changé grâce à sept jours de violence. La violence est nécessaire”, a-t-il déclaré.

Le ministre français de l’Intérieur Gérald Darmanin a déclaré lundi qu’il se rendrait en Corse mercredi pour une visite de deux jours, cherchant à “ouvrir un cycle de discussions” avec toutes les forces politiques de l’île.

Il a condamné les récentes violences et appelé “à un retour immédiat au calme”.