Une session du parlement français a été suspendue jeudi après l’agitation provoquée par un député d’extrême droite qui a crié “retour en Afrique” alors qu’un collègue noir posait une question au gouvernement sur les arrivées de migrants.

Carlos Martens Bilongo, du parti de gauche La France insoumise (LFI), interrogeait le gouvernement sur la demande de l’ONG SOS Méditerranée d’aider Paris à trouver un port pour 234 migrants secourus en mer ces derniers jours.

“Retournez en Afrique !” a interrompu Grégoire de Fournas, un nouvel élu du Rassemblement national (RN), parti d’extrême droite et anti-immigration.

Cette sortie a déclenché des cris de condamnation et des chants demandant à M. de Fournas de quitter l’assemblée.

En français, les pronoms “he” (il) et “they” (ils) – que l’on entend dans la phrase “Qu’il retourne en Afrique” prononcée par De Fournas – se prononcent de la même façon, ce qui laisse penser qu’il visait peut-être directement Bilongo.

La présidente du Parlement, Yael Braun-Pivet, a finalement été contrainte de suspendre la séance.

Bilongo a déclaré que ces commentaires étaient “honteux”.

“Aujourd’hui, on en revient à la couleur de ma peau. Je suis né en France, je suis un député français”, a-t-il ajouté.

Un membre de l’entourage de Macron a déclaré que le président était “blessé” par ces propos “intolérables”, tandis que le Premier ministre Elisabeth Borne a exhorté l’assemblée à sanctionner le député d’extrême droite, ajoutant que “le racisme n’a pas sa place dans notre démocratie”.

Le Pen soutient son député

La leader d’extrême droite du RN, Marine Le Pen, a soutenu son député sur Twitter en déclarant que “la polémique créée par nos adversaires politiques est évidente et ne trompera pas les Français”.

Le Pen a défié Macron lors du vote présidentiel de cette année, puis a conduit son parti à sa meilleure performance historique lors des élections législatives suivantes, avec 89 députés.

Le parti d’extrême droite a été fondé par son père, Jean-Marie Le Pen, mais sa fille affirme avoir transformé l’ancien Front national en une force dominante, malgré les critiques qui disent que les changements ne sont que cosmétiques.

De Fournas a ensuite défendu son commentaire, déclarant à la télévision BFM que le Rassemblement national veut un arrêt de toute immigration illégale après une augmentation du nombre de personnes essayant de rejoindre la France depuis l’Afrique ces dernières années.

Il a accusé les opposants à la France décomplexée de “manipulation”, et son parti a également nié toute attaque personnelle contre Bilongo, un enseignant d’origine congolaise né à Paris.

De Fournas a ensuite présenté ses excuses à Bilongo pour “le malentendu que mes commentaires ont causé” et au cas où Bilongo aurait été blessé par ceux-ci.

Le parti de Macron refuse de se présenter à de nouvelles séances.

Jordan Bardella – un favori pour succéder officiellement à Le Pen lors du congrès du RN ce week-end – a insisté sur le fait que le député avait voulu dire le retour des bateaux dans les ports africains et a accusé LFI et le gouvernement de “malhonnêteté extrême”.

Le leader de LFI, Jean-Luc Mélenchon, a tweeté que les commentaires étaient “au-delà de l’intolérable” et que le député devrait être expulsé de l’Assemblée nationale.

Une commission parlementaire se réunira vendredi pour discuter de l’incident, qui pourrait voir de Fournas sanctionné par une exclusion temporaire de l’Assemblée.

Le parti centriste Renaissance de Macron refusera d’assister à de nouvelles sessions si le conseil n’émet pas une “lourde sanction”, a déclaré son vice-président au parlement Sylvain Maillard sur Twitter.

Le parti au pouvoir n’a pas réussi à obtenir une majorité globale lors des élections législatives, ce qui entraîne des tensions alors que le gouvernement de Macron cherche à faire passer des projets de loi clés dans l’assemblée législative.

Les députés du RN ont été impliqués dans des controverses antérieures au cours du dernier mandat. Tout d’abord, le doyen d’âge de l’Assemblée nationale, José Gonzales, a fait l’éloge de l’Algérie française et de son régime colonial le 28 juin.

Lors d’une récente session, deux députés RN se sont attaqués au gouvernement, traitant le ministre de l’Economie Bruno Le Maire de “lâche” et le ministre de l’Education Pap Ndiaye de “communautariste”.

Ces invectives ont entraîné des sanctions de la part du président de l’Assemblée nationale, qui doivent également être débattues par le bureau de l’institution.

De Fournas, viticulteur dans le Nord Médoc, en est à son premier mandat à l’âge de 37 ans, il n’avait participé à aucun ralliement jusqu’à présent au Palais Bourbon, où il siège à la commission des affaires économiques.