Le président français Emmanuel Macron a donné mercredi soir une interview télévisée révélatrice, décrivant ses espoirs pour l’avenir et ses regrets pour le passé. Même s’il ne s’est pas déclaré candidat pour 2022, cet entretien est un signe supplémentaire qu’il se représentera.

Le président français Emmanuel Macron a déclaré ses futures « ambitions » pour le pays, mais a refusé de déclarer officiellement qu’il briguait un second mandat lors d’une longue interview télévisée aux heures de grande écoute mercredi qui l’a vu défendre son bilan en tant que réformateur économique.

Après une rare conférence de presse de deux heures la semaine dernière pour exposer ses ambitions européennes, le chef de l’Etat de 43 ans s’est entretenu avec des journalistes de la chaîne TF1 alors que la campagne en vue du scrutin d’avril prochain s’enflamme.

« Si votre question est ‘avez-vous une vision d’avenir ?’, ‘avez-vous des ambitions pour notre pays, pour les Français au-delà d’avril prochain ?’. Clairement », a répondu le centriste lorsqu’on lui a demandé s’il se présenterait pour un autre mandat de cinq ans.

“Je n’ai jamais pensé qu’on pourrait tout faire en cinq ans”, a-t-il déclaré lors de l’interview qui a été préenregistrée mais diffusée mercredi soir.

Mais il a fait valoir qu’il devait rester concentré sur la gouvernance avant de donner une “réponse ferme et sincère” à propos de sa candidature au pays.

En plus de son récent travail médiatique, le plus jeune président du pays, lorsqu’il a été élu en 2017, a également fait le tour de la France rurale et des petites villes ces dernières semaines dans ce qui a ressemblé à une campagne populaire.

Comme ses prédécesseurs dont François Mitterrand et Nicolas Sarkozy, les observateurs disent qu’il semble déterminé à gagner du temps, en utilisant le mégaphone présidentiel et les avantages de sa fonction jusqu’au plus tard possible.

“Je vais continuer jusqu’au dernier quart d’heure”, a-t-il déclaré.

Le rôle de la France dans la présidence tournante de l’Union européenne à partir du 1er janvier, qui verra Macron établir l’agenda officiel de l’UE, est également considéré comme un autre facteur favorisant une déclaration tardive.

Champ de niveau

Les récents gains dans les sondages de certains de ses opposants l’année prochaine pourraient également expliquer sa soudaine volonté de s’ouvrir aux médias après des années passées à tenir les journalistes à distance.

Vendredi, la radio RTL diffusera un événement spécial au cours duquel il répondra aux questions des écoliers.

La semaine dernière, un sondage du groupe d’enquête Elabe montrait que l’ancien banquier d’affaires avait perdu pour la première fois le 24 avril le deuxième tour des élections face à l’aile droite Valérie Pécresse du parti Les Républicains.

Pecresse, la combative à la tête de la région parisienne et ancienne ministre de Sarkozy, a connu un énorme rebond dans les sondages depuis l’investiture de son parti le 4 décembre.

Elle a critiqué l’interview télévisée de mercredi soir qui, selon elle, était la preuve d’un terrain de jeu inégal pour ceux qui regardaient le palais de l’Élysée.

“Nous ne pouvons pas avoir un président-candidat qui a des chaînes de télévision ouvertes pour lui quand il le veut et qui fait campagne pendant des heures, tandis que ses opposants ont cinq minutes dans un panel pour lui répondre”, a-t-elle déclaré lundi.

Elle a promis de porter plainte auprès du régulateur français des médias, le CSA, qui surveille le temps accordé aux candidats à la présidentielle pour s’assurer que chacun d’eux reçoive une facturation équitable.

Regrets

Macron a été interrogé à plusieurs reprises sur les erreurs commises au début de sa campagne lorsqu’il a été accusé d’avoir bafoué les électeurs, l’un des facteurs à l’origine d’une énorme réaction des manifestants antigouvernementaux connus sous le nom de « gilets jaunes ».

“J’ai appris à avoir beaucoup plus de respect pour tout le monde, je pense pouvoir le dire”, a déclaré Macron, admettant que son “envie de faire bouger les choses” avait parfois été contre-productive.

“Avec certains de mes mots, je blesse les gens”, a-t-il déclaré.

Le politicien du parti socialiste Boris Vallaud a décrié l’interview comme “comme une confession publique sans une seule nouvelle idée”.

Macron a défendu ses réformes du droit du travail, facilitant le licenciement des entreprises par les entreprises, ainsi que les réductions d’impôts qui, selon lui, ont permis au pays de faire face à la crise de Covid-19 dans une position plus forte.

Le chômage en France est tombé à 8,1% au dernier trimestre, contre 9,5% lors de l’élection de Macron, mais reste supérieur à la moyenne des autres pays qui utilisent l’euro.

Il a également laissé entendre qu’une grande réforme des retraites, qu’il a abandonnée au début de la pandémie de Covid-19, ferait partie de son programme pour un second mandat.

Il a admis que ses idées initiales étaient trop « anxiogènes » et devaient être reformulées, mais l’objectif resterait le même.

“Nous devons être prêts à l’idée de devoir travailler plus longtemps”, a-t-il déclaré.