L'imprimerie du groupe Riccobono à Tremblay-en-France, près de Paris, où est imprimé le quotidien français Le Monde.

L’imprimerie du groupe Riccobono à Tremblay-en-France, près de Paris, où est imprimé le quotidien français Le Monde. Photo de Martin BUREAU / AFP

Le Monde a présenté des excuses personnelles très inhabituelles à Macron pour l’article, écrit par le chercheur Paul Max Morin après que le président ait effectué une visite sensible dans l’ancienne colonie française à la fin du mois dernier.

Dans son article, Morin a soutenu qu’un commentaire fait par Macron en Algérie sur une “histoire d’amour qui a son élément tragique” glorifiait le passé colonial et représentait un retour en arrière par rapport à ses tentatives précédentes pour une attitude plus moderne envers l’histoire de la France dans le pays d’Afrique du Nord.

“Réduire la colonisation en Algérie à une ‘histoire d’amour’ est le point culminant du virage à droite de Macron sur la question de la mémoire”, a soutenu Morin dans l’article. Mais Le Monde a déclaré qu’il avait ensuite supprimé l’article car Morin avait mal interprété la citation.

Bien qu’elle puisse faire l’objet de différentes interprétations, l’expression “une histoire d’amour qui a sa part de tragique” utilisée par M. Macron ne faisait pas spécifiquement référence à la colonisation – comme cela était écrit dans l’article – mais à la longue histoire des relations entre la France et l’Algérie”, a déclaré le journal.

“Le Monde présente ses excuses à ses lecteurs ainsi qu’au président de la République”, ajoute-t-il.

” Inexplicable et inexcusable “.

Mais la démarche a été suivie d’un torrent de critiques, notamment de la part de personnalités de gauche.

“Un article d’opinion a été retiré pour une citation de Macron qu’il n’a pas aimée”, a tweeté le leader d’extrême gauche Jean-Luc Mélenchon. “C’est un nouveau coup bas dans l’effondrement d’un journal qui était autrefois une référence”.

“Une censure stupéfiante”, a ajouté Edwy Plenel, un ancien rédacteur en chef du Monde qui a ensuite fondé le site d’investigation Mediapart.

Morin lui-même a déclaré au quotidien Libération que “retirer un article est une pratique anormale et incompréhensible.”

“Censure inexplicable et inexcusable du Monde”, a tweeté le grand économiste français Thomas Piketty. “On peut ne pas être d’accord avec l’article, mais pas le supprimer parce qu’il déplaît à l’Élysée”.

Il n’y a pas eu de commentaire immédiat du bureau de Macron.

La controverse est doublement sensible étant donné que c’est Le Monde qui, en octobre 2021, a cité des commentaires à huis clos de Macron décrivant le système algérien comme “politico-militaire” qui a provoqué une nouvelle crise dans les relations avec Alger.

“Quand on fait des erreurs qui sont de notre fait, il est normal de s’excuser auprès des personnes qui ont pu être offensées, à commencer par nos lecteurs”, a déclaré à l’AFP le directeur du Monde, Jérôme Fenoglio.

Dans ses discours, Macron se dépeint comme un champion de la liberté de la presse, mais il y a eu des épisodes dans le passé qui, selon les critiques, révèlent une attitude plus fine.

En novembre 2020, le Financial Times a retiré un article qui critiquait amèrement la politique de la France dans la lutte contre l’extrémisme islamiste. Macron a suivi en envoyant une lettre au journal pour attaquer amèrement l’article.