L'extrême droite française s'apprête à choisir Bardella, 27 ans, comme successeur de Le Pen

La chef de file des députés français et présidente du groupe parlementaire du Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, et le député européen français et candidat à la présidence du RN, Jordan Bardella (G). Photo : Alain JOCARD/AFP

Marine Le Pen, qui n’a pas réussi à détrôner Emmanuel Macron lors du scrutin présidentiel du printemps dernier, a néanmoins fait de son parti une force considérable depuis qu’elle a succédé à son père, Jean-Marie Le Pen, il y a 11 ans.

Les efforts pour se débarrasser de son héritage d’opinions antisémites et extrémistes virulentes ont permis aux candidats du RN de remporter 89 sièges à l’Assemblée nationale après la réélection de Macron, privant son parti centriste d’une majorité absolue.

En se retirant de la tête du parti, Le Pen se concentrera sur la direction du groupe RN au Parlement, où elle disposera d’une plateforme puissante pour une éventuelle quatrième candidature à la présidence en 2027.Des sources du parti ont déclaré à l’AFP que la seule incertitude est “l’ampleur de la victoire” de Bardella sur son rival Louis Aliot, un vétéran du parti et ancien partenaire de Le Pen.

Élevé par sa mère née en Italie, Bardella promeut une image lisse, rarement vu sans costume, et a impressionné cette année avec des performances pointues dans les débats électoraux.Mais les ombres du passé demeurent pour le parti.

Cette semaine, Le Pen et Bardella, qui assure déjà l’intérim, ont dû défendre l’un de leurs membres du parlement qui a été suspendu à la suite d’accusations de débordement raciste contre un collègue.

Grégoire de Fournas a crié “retour en Afrique” à un législateur noir qui contestait la réponse du gouvernement aux migrants sauvés en mer en Méditerranée.

Il a par la suite déclaré qu’il faisait référence au bateau et non à son collègue législateur, mais le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a déclaré vendredi que Bardella avait montré sa complicité dans le “racisme quotidien”.

Nostalgie extrémiste ?

Des questions se posent également sur la valeur de la présidence du RN pour Bardella, étant donné que Le Pen dirige officiellement sa cohorte au parlement et est largement attendue comme sa candidate à la présidence en 2027. Mais la position du parti peut aussi être un tremplin pour le moment où “MLP” se retire définitivement de la scène politique.

Bardella a également été critiqué ces dernières semaines par Aliot, qui en tant que maire de Perpignan est le seul politicien RN à diriger une ville de plus de 100.000 habitants.Aliot l’a accusé d’encourager les groupes suprématistes blancs, ce qui devrait être inacceptable pour un parti qui essaie de prouver qu’il peut unir et gouverner le pays.

Bardella a également donné du crédit en août 2021 à la théorie du complot dite du “Grand Remplacement” d’une “islamisation” subreptice de l’Europe orchestrée par ses élites – ce dont Le Pen s’est éloigné.

Dans une lettre ouverte le mois dernier, Aliot a dénoncé la “nostalgie extrémiste” et “les excès du Front national d’une époque révolue”, une référence au nom original du parti.

Aliot a déclaré par la suite qu’il visait les partisans d’Eric Zemmour, l’expert d’extrême-droite qui a siphonné de nombreux électeurs du RN avec ses positions les plus extrémistes dans la compétition présidentielle de ce printemps.

Bardella l’a accusé d'”amertume et de mauvaise foi”, insistant sur le fait que son objectif est de gagner plus de partisans des partis traditionnels de droite et de gauche.

Pour brouiller davantage l’establishment politique français, le RN a voté aux côtés du parti d’extrême gauche La France insoumise en faveur des motions de censure déposées contre le gouvernement lors de débats budgétaires houleux.