La France pousse les États de l'UE à partager la charge des demandeurs d'asile

(Photo : Alain Jocard / AFP)

La France cherche à pousser l’Union européenne vers un pacte sur l’asile, en suspens depuis longtemps, en proposant de relocaliser quelque 10 000 demandeurs d’asile dans les Etats membres qui le souhaitent – et de faire payer ceux qui ne le souhaitent pas.

La proposition, présentée au cours des dernières semaines de la présidence française de l’Union européenne, vise à débloquer ce dossier épineux par une approche progressive.

Au lieu de tenter de passer au bulldozer l’opposition de plusieurs Etats membres, principalement de l’Est, à une révision des règles d’asile de l’Union, le plan appelle à un “mécanisme de solidarité volontaire” sur une base d’essai de 12 mois, selon un document français vu par l’AFP.

Présenté vendredi à une réunion des ministres de l’Intérieur de l’UE à Luxembourg, il prévoit que les 19 Etats de l’espace Schengen s’engagent à accueillir des demandeurs d’asile provenant de pays sous pression comme la Grèce, l’Italie et Malte.

Ceux qui n’en accueilleront pas apporteront une contribution financière pour aider ceux qui le feront.

Les diplomates de l’UE ont déclaré que la mesure non contraignante concernerait 10 000 demandeurs d’asile par an, avec la possibilité que le plan soit renouvelé chaque année.

“Une grande majorité de pays se sont montrés favorables à cette solidarité, et une dizaine de pays sont favorables aux relocalisations, ce qui est très positif”, a déclaré le ministre français de l’Intérieur Gérald Darmanin en entrant dans la salle pour présider la réunion.

Il a précisé que la France et l’Allemagne faisaient partie de cette douzaine.

Au début des discussions, M. Darmanin a tweeté qu’il y avait eu une “avancée majeure” et qu’une grande majorité des Etats membres soutiendraient le plan.

Pays opposés
La commissaire européenne chargée des migrations, Ylva Johansson, a déclaré qu’elle considérait cette étape comme un pas important après avoir passé de nombreux mois à tenter en vain de faire adopter par les États membres une proposition plus large de réforme de l’asile dévoilée en septembre 2020.

Elle intervient également à un moment où l’Europe accueille plus de quatre millions de réfugiés ukrainiens, qui ne relèvent pas des règles d’asile appliquées à d’autres nationalités comme les Syriens et les Afghans, a-t-elle noté.

“Tous les pays sont touchés par la crise des réfugiés ukrainiens. Mais nous avons aussi d’autres réfugiés et migrants qui arrivent, et nous avons besoin de solidarité pour cela”, a-t-elle déclaré.

La ministre allemande de l’Intérieur, Nancy Faeser, a déclaré qu’elle pensait que “10 à 12 pays” étaient derrière le plan, dont elle était “assez confiante” quant à son adoption.

Mais son homologue autrichien, Gerhard Karner, a signalé une forte opposition, déclarant : “Je suis absolument contre l’envoi d’un mauvais signal aux passeurs de migrants”.

Les Pays-Bas ont déjà déclaré qu’ils n’accueilleraient pas de demandeurs d’asile dans le cadre de la proposition, bien qu’un diplomate ait déclaré qu’ils pourraient contribuer d’autres manières.

D’autres pays, comme la Hongrie et la Pologne, s’opposent depuis longtemps à tout programme obligatoire de relocalisation des migrants.

La proposition française souligne que l’identification des demandeurs d’asile entrant dans l’Union a été améliorée grâce à l’utilisation élargie d’Eurodac, une base de données biométriques, et à un nouveau système de filtrage des entrées.

Elle vise également à minimiser les mouvements dits secondaires, où les demandeurs d’asile quittent le pays où ils sont traités pour un autre État membre, souvent plus riche, comme l’Allemagne ou la France.