Des militantes féministes ont fustigé le gouvernement français pour ne pas avoir protégé les femmes contre la violence sexiste et ont appelé à une action gouvernementale plus sévère après que trois femmes auraient été tuées par leur partenaire actuel ou ancien le premier jour de 2022.

Le gouvernement français a promis mardi d’intensifier la lutte contre les féminicides après la mort de trois femmes dans des agressions présumées de violence domestique dans les 24 heures, déclenchant un tollé d’associations féministes.

Ils accusent le gouvernement du président Emmanuel Macron d’avoir trop peu fait pour protéger les femmes, après 113 morts aux mains d’hommes, souvent leurs partenaires masculins ou ex-partenaires en 2021.

De 8h à 20h le 1er janvier 2022, “à l’heure où familles et amis fêtaient le nouvel an”, les associations françaises “#NousToutes” et “Féminicides Par Compagnons ou Ex” ont toutes deux signalé trois féminicides dans différents coins de France.

Ils ont dénoncé “le silence d’Emmanuel Macron et du gouvernement face aux violences sexistes et sexuelles en France”.

Samedi, la police de Nice, dans le sud de la France, a retrouvé le corps d’une femme dans le coffre d’une voiture, et son ex-conjoint a avoué l’avoir étranglée.

Dans l’est de la Meurthe-et-Moselle, un homme d’une cinquantaine d’années a reconnu avoir tué sa compagne, une femme de 56 ans, dont le corps a été retrouvé samedi par la police avec l’arme du crime, un couteau, toujours planté dans la poitrine. .

Et aux petites heures de dimanche, un soldat de 21 ans a poignardé à mort sa petite amie de 27 ans, également militaire, après une dispute près de Saumur, dans l’est de la France.

« Loin d’être suffisant »

“Il y a eu plus de 100 féminicides en 2021 et déjà depuis le début de l’année trois nouveaux meurtres commis dans des conditions scandaleuses”, a déclaré mardi au Parlement le Premier ministre Jean Castex.

“Le gouvernement et la nation sont totalement engagés dans la lutte contre ce fléau”, a-t-il poursuivi.

Castex a déclaré que le gouvernement avait déjà pris plusieurs mesures pour lutter contre la violence domestique, notamment la mise en place d’une hotline d’urgence 24h/24 et 7j/7 et une formation de sensibilisation pour 90 000 policiers afin d’améliorer le traitement des plaintes de maltraitance des femmes.

À partir de l’année prochaine, il y aurait également une “semaine de l’égalité” dans les écoles vers le 8 mars, à l’occasion de la Journée internationale de la femme, a ajouté Castex.

Le gouvernement a révélé qu’il dépensait 1 milliard d’euros par an pour lutter contre les violences conjugales, mais les associations disent que c’est “loin d’être suffisant” et ont expliqué que les mesures devraient se concentrer davantage sur la prévention, avec l’utilisation de bracelets électroniques – pour alerter les femmes et la police sur l’approche d’un ex-partenaire potentiellement violent — encore pas assez répandue.

Marylie Breuil, membre de #NousToutes, a en outre souligné qu'”il y a une énorme disparité entre les moyens déployés et le nombre de femmes qui sont la cible de violences conjugales”, qui, selon elle, s’élève à plus de 200 000 en France.

“Le nombre de féminicides d’année en année ne diminue pas, et c’est très grave”, a-t-elle ajouté.

Le sujet a fait une entrée potentielle en campagne pour la présidence française mardi, avec la candidate conservatrice Valérie Pécresse appelant à des tribunaux spéciaux pour traiter les affaires de violence domestique.

“Jamais la violence domestique n’a été aussi présente dans le débat public”, a déclaré Pécresse. “Mais c’est loin d’être suffisant.”

Le plus grand nombre de féminicides par habitant

La France reste l’un des pays européens avec le plus grand nombre de féminicides par habitant. On estime qu’au moins une femme est tuée par son partenaire ou ancien partenaire tous les trois jours.

Le collectif “Féminicides Par Compagnons ou Ex” a recensé tous les féminicides survenus en France au cours des six dernières années – 770 décès à ce jour depuis 2016.

En 2019, 146 femmes ont été tuées par un conjoint ou un partenaire, une augmentation de 21 % par rapport à l’année précédente.

En septembre 2020, à la suite de manifestations de masse à travers la France, le gouvernement a introduit l’utilisation de bracelets électroniques pour alerter les victimes lorsque leurs agresseurs se trouvent à proximité.

La même année, il y a eu une baisse des meurtres, avec 102 femmes et 23 hommes tués selon les chiffres sur les violences conjugales du ministère français de l’Intérieur.

En 2021, 113 femmes sont décédées aux mains d’un partenaire ou d’un ex-partenaire en France.

“C’est une tâche difficile mais nécessaire de s’assurer que ces femmes ne restent pas invisibles, qu’elles soient nommées chaque fois que possible et ne deviennent pas simplement l’une des nombreuses victimes anonymes d’un chiffre annuel mondial qui ne suscite pas beaucoup d’inquiétude ou d’indignation parmi les politiciens ou même la société”, a déclaré le groupe dans un communiqué sur sa page Facebook.

“Ce ne sont pas des ‘drames familiaux’ ou des ‘drames de rupture’ ou des ‘crimes passionnels’. Ce sont des féminicides conjugaux perpétrés par des hommes frustrés qui pensent avoir le droit de tuer”, poursuit le communiqué.

Pour la journaliste et documentariste française Mélina Huet, ces chiffres sont “sous-estimés”.

“C’est vraiment difficile de dire si ça empire, surtout avec la crise du COVID. Mais une chose est sûre, c’est que ça ne s’améliore pas. Ça ne s’améliore pas au moins aussi vite qu’il devrait l’être, selon les principaux objectifs du gouvernement “, a déclaré Huet à Euronews.

Six policiers français font également l’objet d’audiences disciplinaires à partir du 4 janvier, alors qu’ils sont accusés de « manquements administratifs » dans l’affaire macabre de la mère de famille Chahinez Daoud, 31 ans, tuée par son mari en mai dernier.

Daoud était la 39e des 113 femmes décédées aux mains d’un partenaire ou d’un ex-partenaire en France en 2021.