Le président français Emmanuel Macron a fait la une des journaux dans le monde entier avec son langage fort sur ceux qui refusent le vaccin Covid – mais cela va-t-il vraiment nuire à ses chances d’être réélu, demande John Lichfield ?

Le président Emmanuel Macron qu’il voulait“” (faire chier) les non vaccinés.

Cue une explosion de fausse colère parmi ses adversaires à son utilisation d’un langage aussi irrespectueux et non présidentiel. Le président a-t-il “p**d off” plus de personnes qu’il ne l’avait prévu ?

J’en doute. Plus de 92 pour cent des Français éligibles sont désormais vaccinés pour la première fois et 90,5 pour cent ont reçu une double piqûre.

Les 10 pour cent restants sont un groupe éclectique d’obsessionnels anti-vaccins ou de fous, de libertaires têtus et d’un grand groupe de plus de 80 ans qui quittent rarement la maison et (bêtement) ne voient aucun intérêt à se faire piquer. Peu d’entre eux, je suppose, sont des électeurs potentiels de Macron.

Les propos de Macron étaient tout de même risqués. Ce n’était clairement pas un trébuchement improvisé. Sa réponse à une infirmière lors d’une séance de questions-réponses avec les lecteurs du Parisien était bavarde et vulgaire dans son style mais longue et réfléchie dans son contenu.

L’infirmière, qui travaille dans une clinique pour personnes âgées, a déclaré que 85 pour cent des personnes occupant les lits de soins actifs sur son lieu de travail n’étaient pas vaccinées. Et pourtant, a-t-elle dit, les opérations urgentes pour les patients cancéreux vaccinés ont été reportées faute de lits.

En réponse, Macron a déclaré que les “pires ennemis de la démocratie” étaient “le mensonge et la bêtise”. Comment le gouvernement a-t-il pu réduire la petite minorité des non-vaccinés ?

“En – et je suis désolé de le dire ainsi – en les repoussant encore plus”, a déclaré Macron. «Je suis généralement opposé à ce que les Français soient p…d off. Je me plains tout le temps des blocages administratifs. Mais quand il s’agit des non-vaccinés, j’ai très envie de… les chasser. Alors on va le faire, la fin. C’est notre stratégie.

De nouvelles règles adoptées par le Parlement – ​​retenues à deux reprises par les députés de l’opposition, même si beaucoup d’entre eux les soutiennent – ​​transformeront le « passe-santé » existant en un « passe-vaccins ». Seuls les vaccinés, et progressivement seuls les vaccinés de rappel, auront accès au plaisir ou au voyage.

A partir du 15 janvier, a déclaré Macron à l’infirmière, les non-vaxxés “ne pourraient plus aller dans des restos ou prendre un verre rapide ou un café ou aller au théâtre ou au cinéma…”

Je ne pense pas que l’utilisation par Macron d’un langage aussi direct et vulgaire ait été une erreur spontanée.

Il s’agissait d’un clin d’œil délibéré aux millions de Français vaccinés qui sont déjà « p… d off » avec les mensonges et les obscurcissements et des non vaxxés – et par le langage et les actions violentes d’une petite minorité de cette minorité.

Il était également conçu comme un piège pour les politiciens de l’opposition et les candidats présidentiels rivaux – un piège dans lequel beaucoup d’entre eux se sont lancés avec enthousiasme. Macron, ont-ils protesté, « trompait » le langage de la politique française. Il agissait comme un « petit dictateur ». Peut-être mais surtout il « agissait » – faisait quelque chose.

Les partisans de Macron avaient déjà accusé ses opposants de faire de la politique avec une crise sanitaire parce qu’ils avaient grossièrement utilisé une manœuvre parlementaire pour écourter le débat toute la nuit sur le nouveau laissez-passer vaccinal lundi soir.

Désormais, les macronistes accusent l’opposition – dont la candidate de centre-droit prétendument pro-vaccin Valérie Pécresse – d’utiliser une indignation fausse et stérile pour courtiser les voix d’une minorité d’anti-vaccins.

Oui, le langage de Macron était un peu grossier, disent les Macronistes. Mais cela reflète une colère que beaucoup de gens partagent. S’il parle formellement, il est accusé d’être déconnecté. S’il parle familièrement, il est accusé d’être vulgaire. Il fait au moins quelque chose. L’opposition est réduite à faire de la politique.

En fait, Macron a raison. Selon les chiffres officiels, les personnes non vaccinées ont 17 fois plus de chances de se retrouver en soins aigus que les vaccinées.

Dans la semaine du 13 au 19 décembre, 1,5 pour un million de personnes complètement vaccinées étaient en soins aigus avec Covid (tous encore des cas Delta). Le chiffre pour les non-vaxxés était de 26 sur un million.

Le gouvernement pourrait-il faire plus pour faire vacciner les gens sans les contraindre ou les insulter ? Pour la plupart des groupes d’âge, non. Il y a cependant une faiblesse flagrante dans l’argumentation de Macron : le taux de vaccination relativement faible des plus de 80 ans en France

Les octogénaires et plus sont la tranche d’âge la plus vulnérable au Covid, mais en France ce sont la tranche d’âge adulte la moins vaccinée. Seulement un peu plus de 90 pour cent ont été doublement vaccinés, contre 98 pour cent des septuagénaires. Ils sont bien sûr aussi la tranche d’âge la moins touchée par les freins au « plaisir » et aux voyages. Le gouvernement devrait faire plus pour les atteindre.

Mais ce n’est pas le risque politique que prenait Macron hier. Le vrai risque était celui dont je me suis plaint auparavant : la détermination évidente de Macron à faire campagne pour sa réélection depuis l’intérieur des murs de l’Elysée.

Son langage hier n’était pas présidentiel. C’était la langue de quelqu’un qui faisait des élections plutôt que de gouverner. Il n’est pas le premier président à chercher l’avantage en confondant les deux rôles. Il est le premier à le faire alors que le pays fait face à une crise aussi aiguë.

Macon a déclaré hier lors de la séance de questions-réponses qu’il était impatient de se présenter à nouveau mais qu’il attendrait que la situation sanitaire soit plus claire avant de déclarer officiellement.

Je pense que le candidat Macron influence déjà le jugement du président Macron sur la réponse largement attentiste du gouvernement à la nouvelle vague Omicron de Covid.

Il peut s’en tirer. Il peut même en profiter. Mais il pourrait payer un lourd tribut électoral si les chiffres des soins aigus et des décès deviennent incontrôlables le mois prochain.