La France annonce le retrait des troupes du Mali

La France commencera à retirer ses soldats du Mali, après près d’une décennie dans le pays. Photo de Philippe DESMAZES / AFP

Dans une déclaration commune, Paris ainsi que d’autres pays de l’UE et le Canada se sont engagés à poursuivre “une action conjointe contre le terrorisme dans la région du Sahel, y compris au Niger et dans le golfe de Guinée”.

La décision s’applique à la fois à la force française Barkhane au Sahel et à la force européenne Takuba que Paris avait tenté de forger avec ses alliés.

“Les conditions politiques, opérationnelles et juridiques ne sont plus réunies pour poursuivre efficacement leur engagement militaire actuel dans la lutte contre le terrorisme au Mali”, indique le communiqué.

Les alliés ont donc « décidé d’entamer le retrait coordonné de leurs moyens militaires respectifs dédiés à ces opérations du territoire malien ».

L’annonce a été faite alors que le président Emmanuel Macron doit se rendre à Bruxelles jeudi pour un sommet UE-Afrique de deux jours, à la suite d’une conférence de presse à 9 heures à l’Elysée sur “l’engagement de la France au Sahel”.

Le déploiement au Mali a été semé d’embûches pour la France. Sur les 53 soldats tués au service de sa mission Barkhane en Afrique de l’Ouest, 48 d’entre eux sont morts au Mali.

La France a initialement déployé des troupes contre les djihadistes au Mali en 2013, mais l’insurrection n’a jamais été complètement réprimée, et maintenant de nouvelles craintes ont émergé d’une poussée djihadiste dans le golfe de Guinée.

Même après le retrait du Mali, cependant, les alliés ont juré de rester engagés dans la lutte contre le terrorisme dans d’autres pays, dont le Niger.

“Ils ont néanmoins convenu de poursuivre leur action commune contre le terrorisme dans la région du Sahel, y compris au Niger et dans le golfe de Guinée”, indique le communiqué.

“Ils ont engagé avec eux des consultations politiques et militaires dans le but de définir les modalités de cette action commune d’ici juin 2022.”

L’annonce du retrait est intervenue à un moment critique pour Macron, quelques jours seulement avant une déclaration tant attendue du président selon laquelle il se représentera pour un nouveau mandat lors des élections d’avril.

Cela a également coïncidé avec le fait que Macron cherchait à jouer un rôle de premier plan dans la diplomatie internationale alors qu’il pressait la Russie de désamorcer l’impasse sur l’Ukraine.

Surtout avec les élections françaises qui se profilent, la priorité de Macron est de s’assurer que tout retrait n’invite pas à des comparaisons avec le départ chaotique des États-Unis d’Afghanistan l’année dernière.

Macron a préparé mercredi le terrain pour l’annonce avec un dîner réunissant les dirigeants des principaux alliés de la France dans la région du Sahel – le Tchad, la Mauritanie et le Niger.

Les responsables du Mali et du Burkina Faso, qui ont également récemment connu un coup d’État, n’ont pas été invités à la réunion.

Au total, 25 000 soldats étrangers sont actuellement déployés dans la région du Sahel.

Ils comprennent environ 4 300 soldats français, qui, en vertu d’une réduction annoncée l’année dernière, devraient tomber à environ 2 500 en 2023 contre un pic de 5 400.

Les autres forces déployées au Mali sont la mission de maintien de la paix de l’ONU MINUSMA créée en 2013 et l’EUTM Mali, une mission de formation militaire de l’UE qui vise à améliorer la capacité de l’armée malienne à combattre les terroristes.

Quelque 2 400 soldats français sont déployés au Mali dans le cadre de l’opération Barkhane ainsi que de la force européenne Takuba mise en place en 2020, qui devait augmenter en nombre à mesure que le déploiement français était réduit.

Selon une source française, qui a demandé à ne pas être identifiée par son nom, même après le départ, la France fournira pendant un certain temps à la MINUSMA et à l’EUTM un soutien aérien et un soutien médical.

Mais le retrait de Paris pourrait préparer le terrain pour que d’autres puissances européennes comme la Grande-Bretagne ou l’Allemagne abandonnent leur rôle dans les missions multinationales.

“Le départ de Barkhane et Takuba crée un vide”, a déclaré mercredi le président ivoirien Alassane Ouattara.

Au Sahel et dans le golfe de Guinée, “les armées nationales devront faire face à des problèmes sur nos territoires nationaux, et c’est notre philosophie”, a-t-il déclaré aux diffuseurs RFI et France 24.

Les relations entre la France et le Mali ont plongé à de nouveaux plus bas après que la junte dirigée par l’homme fort Assimi Goita a refusé de s’en tenir à un calendrier de retour à un régime civil.

L’Occident accuse également le Mali d’utiliser les services du groupe de mercenaires russes extrêmement controversé Wagner pour consolider sa position, une décision qui donne à Moscou un nouveau pied dans la région.

“C’est une fin sans gloire d’une intervention armée qui a commencé dans l’euphorie et qui se termine, neuf ans plus tard, sur fond de crise entre le Mali et la France”, commente le quotidien Le Monde.