Les rivaux présidentiels français prêts pour un débat télévisé à fort enjeu

(Photo : Charly Triballeau / AFP)

Les deux rivaux ont organisé des événements discrets après une brève pause de Pâques avant le face-à-face de mercredi, où le centriste Macron défendra son bilan des cinq dernières années contre son rival d’extrême droite.

Il s’agira d’une revanche de leur débat de 2017, lorsque les deux mêmes finalistes s’étaient affrontés au même stade de la campagne. Selon les analystes, ce match avait été remporté haut la main par Macron, qui se présentait pour la première fois à une fonction publique.

Le Pen, qui fait sa troisième tentative pour la présidence, insiste sur le fait qu’elle est mieux préparée cette fois-ci.

“Je suis très confiante, et je pense que je vais gagner”, a déclaré la candidate du Rassemblement national en posant pour des selfies avec des sympathisants sur la place du village ensoleillée de Saint-Pierre-en-Auge en Normandie, dans le nord de la France.

“J’espère que ce débat se déroulera dans le calme (…) J’espère que ce ne sera pas ce que j’entends depuis une semaine, une série d’insultes, de fake news et d’excès”, a-t-elle ajouté.

Les sondages d’opinion suggèrent depuis des semaines que Macron a l’avantage. Lundi, une enquête Ipsos-Sopra Steria sur les intentions de vote le donnait gagnant avec 56%. L’Ifop le donnait gagnant avec 54,5 %.

Mais en tenant compte des marges d’erreur, Macron sait qu’il n’y a pas de place pour la complaisance. Les sondages ont sous-estimé les résultats des candidats d’extrême droite dans le passé – notamment en 2002, lorsque Jean-Marie Le Pen, le père de M. Le Pen, a atteint le second tour de la présidentielle contre Jacques Chirac.

Les partisans de Macron – et Macron lui-même – se sont efforcés de souligner que rien n’était joué d’avance.

Dans une interview accordée à la chaîne de télévision France 5 lundi soir, M. Macron a rappelé les résultats choquants qui ont vu Donald Trump remporter la présidence des États-Unis et la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne approuvée.

“Alors si vous voulez éviter l’impensable ou quelque chose qui vous répugne, choisissez vous-même”, a-t-il déclaré.

Rassurer tout le monde
Macron s’en est pris à la proposition de Mme Le Pen d’organiser des référendums constitutionnels sur des lois d’immigration plus strictes, à son projet de “priorité nationale” pour les citoyens français en matière d’emploi et de prestations sociales, et à son soutien aux initiatives citoyennes pour proposer et voter des lois.

“Elle laisse entendre qu’une fois élue, elle se croit au-dessus de la Constitution puisqu’elle peut décider de ne pas la respecter en changeant les règles”, a-t-il déclaré à la radio France Culture dans une interview diffusée lundi.

Mais au lieu de se concentrer sur l’immigration et la menace de l’extrémisme islamiste, Mme Le Pen a surtout insisté sur ses plans pour lutter contre la hausse des prix, un élément clé de sa stratégie visant à présenter un visage plus modéré aux électeurs.

Son équipe a notamment minimisé une proposition d’interdiction du foulard islamique dans les lieux publics, Le Pen reconnaissant qu’il s’agissait d’un “problème complexe” qui nécessiterait un débat parlementaire, et que “je ne suis pas obstinée.”

Mme Le Pen a également répondu à une information selon laquelle l’OLAF, l’organisme de lutte contre la corruption de l’Union européenne, l’a accusée, ainsi que des collègues de haut rang, d’avoir détourné plus de 600 000 euros de fonds européens lorsqu’ils étaient députés européens.

“Les coups bas de l’Union européenne, à quelques jours du second tour, je les connais bien et je pense que les Français ne sont pas stupides”, a-t-elle déclaré, ajoutant que “je dément absolument ces allégations, dont je n’étais même pas au courant.”

La roulette russe
Les sondages suggèrent que jusqu’à un quart de l’électorat français pourrait ne pas voter du tout dimanche, et beaucoup dépendra également des décisions des millions de partisans de gauche de Jean-Luc Mélenchon, qui a terminé en troisième position de justesse au premier tour le 10 avril.

Les résultats d’un sondage publié dimanche et réalisé par le parti de Mélenchon, la France Insoumise, suggèrent que seulement un tiers de ceux qui ont voté pour lui soutiendront Macron pour faire obstacle à une présidence d’extrême droite sous Le Pen.

Les autres ont préféré renvoyer un bulletin blanc ou annulé, ou simplement rester chez eux le jour du vote dimanche prochain.

Mélenchon est en passe de devenir un acteur important de la gauche avant les élections législatives de juin, lors desquelles Macron espère renouveler une majorité s’il est réélu.

Il a refusé d’exhorter les électeurs à soutenir Macron, se contentant de dire que “pas un seul vote” ne devrait aller à Le Pen.

Christophe Castaner, le chef du groupe La République en marche (LREM) de Macron au Parlement, a tenté de minimiser l’importance de ce sondage. Mais il a également mis en garde : “Ne pas choisir, c’est accepter de jouer à la roulette russe”.