Didier Raoult, spécialiste respecté des maladies tropicales, s’est attiré les faveurs mais aussi la réprobation de ses pairs en insistant sur le fait que le Covid pouvait être traité avec l’hydroxychloroquine, un médicament anti-paludisme.
Malgré l’absence de preuves évaluées par les pairs, Raoult a administré le médicament à des centaines de personnes et a contribué à sa promotion par l’ancien président américain Donald Trump et son homologue brésilien populiste Jair Bolsonaro.
Sa défense résolue de l’hydroxychloroquine, malgré plusieurs essais et études discréditant l’efficacité du Covid, lui a valu un avertissement officiel de l’Ordre des médecins français en décembre dernier.
La réprimande a cependant eu peu d’impact, car Raoult avait déjà démissionné de son poste de médecin praticien à l’hôpital universitaire de Marseille, dans le sud de la France.
Mais la controverse a également attiré l’attention des autorités sanitaires sur ses autres recherches, qui ont ouvert des enquêtes à la fin de l’année dernière sur les essais de la Fondation méditerranéenne des infections de Marseille, qu’il dirige toujours.
Mercredi, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a déclaré qu’elle avait constaté des “manquements graves” dans les essais cliniques, dont la plupart avaient débuté plusieurs années avant la pandémie de Covid.
C’est la première fois que les autorités sanitaires nationales françaises mettent explicitement en cause Raoult pour ses pratiques.
“Les règles éthiques n’ont pas été systématiquement respectées, ce qui n’a pas permis de protéger correctement les participants”, a déclaré l’ANSM dans un communiqué.
Dans certains cas, les patients n’ont pas été invités à signer des dérogations prouvant leur consentement, et dans d’autres, les médecins n’ont pas obtenu l’avis requis d’un comité d’évaluation indépendant.
Elle a ordonné l’arrêt des essais défectueux encore en cours et a déclaré qu’elle superviserait des “mesures correctives et préventives” pour assurer une conduite correcte.
Elle a également déposé une plainte contre la fondation de Raoult, affirmant qu’elle avait lancé illégalement certains essais et avait soumis un faux document pour justifier l’un d’entre eux.
Mais elle n’a pris aucune mesure concernant l’administration d’un traitement expérimental contre la tuberculose qui a provoqué de graves effets secondaires chez un grand nombre de patients, un scandale révélé par le site d’investigation Mediapart en octobre 2021.
L’ANSM a déclaré que la fondation de Raoult n’avait pas enregistré les traitements comme un essai clinique, ce qui signifie qu’elle n’avait pas de raisons d’intervenir – mais une enquête est en cours et des plaintes juridiques peuvent encore être déposées, a-t-elle déclaré.
Raoult a nié avoir fait des recherches sur la tuberculose et a déclaré lors d’une conférence de presse la semaine dernière qu’il pourrait poursuivre Mediapart pour avoir décrit les traitements comme des “tests non contrôlés.”
