Des chercheurs français pensent avoir trouvé une alternative naturelle unique aux engrais chimiques. Leur découverte réduit la pollution de l’environnement et aide à nourrir une population mondiale croissante, tout cela grâce à un ingrédient inattendu : l’urine humaine.

Les engrais azotés de synthèse stimulent la production agricole, mais s’ils sont utilisés en excès, ils polluent l’environnement. De plus, leurs prix s’envolent, surtout en ce moment avec la guerre en Ukraine. Les scientifiques ont donc cherché ailleurs une solution à cette combinaison de crises.

Par quoi les scientifiques remplacent-ils les engrais chimiques ?

“Notre urine”, dit le chercheur Fabien Esculier.

Pour se développer, “les plantes ont besoin de nutriments, azote, phosphore et potassium”, explique l’ingénieur et coordinateur de l’équipe de recherche de l’Université du Québec à Montréal. Programme de recherche OCAPI. Lorsque nous mangeons, nous ingérons ces nutriments avant de les “excréter, principalement par les urines”.

Pendant longtemps, les excréments urbains ont été utilisés dans les champs agricoles, avant d’être remplacés par des engrais chimiques.

Mais lorsque ces nutriments sont rejetés en grande quantité dans les rivières, ils constituent l’une des principales sources de pollution.

Aller au-delà des idées reçues

Séparer et collecter l’urine à la source implique de repenser les toilettes, le réseau de collecte des eaux usées – et de dépasser certaines idées reçues.

La séparation des urines des toilettes a d’abord été testée dans des éco-villages suédois au début des années 1990, puis en Suisse ou en Allemagne. Aujourd’hui, des expériences sont également menées aux Etats-Unis, en Afrique du Sud, en Ethiopie, en Inde et au Mexique.

En France, des projets émergent à Dol-de-Bretagne, Paris, Montpellier.

La première génération de toilettes avec séparateur d’urine était considérée comme peu pratique et inesthétique. Un nouveau modèle, cependant, développé par la société suisse Laufen avec l’Eawag, a reçu de bonnes critiques.

Fabien Gandossi, qui possède le restaurant 211 à Paris, a équipé son établissement de ce nouveau modèle sec qui collecte l’urine.

“Nous avons des retours plutôt positifs, des gens un peu surpris, mais (…) ils voient peu de différence par rapport à un système traditionnel”, dit-il.

Les gens sont-ils prêts à manger des aliments fertilisés à l’urine ?

Il existe des différences d’attitude entre les pays où les engrais à base d’urine ont été testés. Le taux d’acceptation est très élevé en Chine, en France et en Ouganda, mais faible au Portugal et en Jordanie.

L’urine n’étant normalement pas un vecteur important de maladies, elle ne nécessite pas de traitement lourd pour être utilisée en agriculture. Le site Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de la laisser reposer et il est également possible de la pasteuriser.

Une fois collectée, l’urine doit être transportée dans les champs. Mais la procédure reste coûteuse. Diverses techniques permettent de réduire son volume et de la concentrer, voire de la déshydrater.

Les obstacles sont nombreux, avec la flambée des prix du gaz et la volonté de nombreux pays de renforcer leur souveraineté alimentaire. Malgré cela, les chercheurs pensent que l’urine est l’avenir des engrais naturels.

Regardez la vidéo ci-dessus pour en savoir plus sur ce projet.