La France est touchée par une grève des transports dans un contexte de tensions liées à la pénurie de carburant

Des passagers marchent avec leurs bagages avant de monter dans un train à la gare Montparnasse à Paris en avril 2021 (Photo de STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

Les effets étaient déjà visibles à la gare de Lyon à Paris tôt mardi, avec des trains de banlieue bondés qui dégorgeaient des flots de passagers sur les quais toutes les 15, voire 20 minutes.

“J’ai un trajet de deux ou trois heures aujourd’hui, au lieu d’une heure et demie normalement”, a déclaré Yera Diallo, une banlieusarde, ajoutant que “je n’ai aucune idée de comment cela va se passer ce soir.”

La grève générale intervient après que les travailleurs de plusieurs raffineries et dépôts pétroliers exploités par le géant de l’énergie TotalEnergies ont voté la prolongation des débrayages.

Leur action industrielle a sérieusement perturbé la distribution de carburant dans tout le pays, mais particulièrement dans le nord et le centre de la France et en région parisienne.

Les automobilistes se sont bousculés pour faire le plein alors que la grève du carburant, qui dure depuis près de trois semaines, paralyse l’approvisionnement d’environ 30 % des stations-service françaises et a un effet d’entraînement sur tous les secteurs de l’économie.

Le gouvernement du Président Emmanuel Macron a utilisé les pouvoirs de réquisition pour forcer certains grévistes à revenir dans les dépôts de carburant ouverts, une décision qui a rendu les syndicats furieux mais qui a jusqu’à présent été confirmée par les tribunaux.

“Nous continuerons à faire le maximum”, a déclaré Macron à l’issue d’une réunion lundi avec des ministres, ajoutant qu’il souhaitait que la crise “soit résolue le plus rapidement possible”.

Le temps de la négociation est terminé

Le ministre des Finances, Bruno Le Maire, avait auparavant déclaré qu’il était nécessaire d’utiliser les pouvoirs de réquisition pour rouvrir les raffineries et les dépôts.

“Le temps de la négociation est terminé”, a déclaré M. Le Maire à l’antenne de BFMTV.

“Il y a eu une négociation, il y a eu un accord”, a-t-il ajouté, faisant référence à l’accord conclu la semaine dernière entre TotalEnergies et deux syndicats majoritaires, mais que le syndicat CGT, de gauche dure, rejette.

Le patron de la CGT Philippe Martinez a suggéré lundi que le gouvernement “se mette autour d’une table” avec les syndicats pour discuter d’une augmentation du salaire minimum en France.

“La réquisition est inacceptable et ce n’est jamais la bonne solution”, a ajouté Frédéric Souillot, secrétaire général du syndicat FO qui participe également à cette journée de grève, le plus grand défi des syndicats à Macron depuis qu’il a remporté un nouveau mandat présidentiel en mai.

Trains annulés

Les syndicats de gauche CGT et FO ont appelé à une grève nationale mardi pour une hausse des salaires, et contre les réquisitions gouvernementales d’installations pétrolières, menaçant de paralyser notamment les transports publics.

Les syndicats d’autres industries et du secteur public ont également annoncé des actions pour protester contre le double impact de la flambée des prix de l’énergie et de l’inflation globale sur le coût de la vie.

L’opérateur ferroviaire SNCF connaîtra de “graves perturbations” avec la moitié des services de train annulés, a déclaré le ministre des Transports Clément Beaune.

Le patron de la CGT, M. Martinez, a déclaré à la radio RTL que “ce sont les travailleurs qui décideront” si la grève à la SCNF se poursuit pendant la période chargée des vacances scolaires de fin octobre.

Les services de banlieue de la région parisienne ainsi que les services de bus seront également touchés, a déclaré l’opérateur RATP, mais le réseau de métro parisien ne devrait pas être affecté.

Au-delà des travailleurs du transport, les syndicats espèrent faire sortir le personnel dans des secteurs tels que l’industrie alimentaire et la santé.

Leur action donnera le coup d’envoi de ce qui risque d’être un automne et un hiver tendus, car Macron cherche également à mettre en œuvre sa politique intérieure phare, à savoir le relèvement de l’âge de la retraite en France.

Mais la pression économique causée en partie par l’invasion de l’Ukraine par la Russie, ainsi que l’échec du parti de Macron à obtenir une majorité globale lors des élections législatives de juin, ne font qu’ajouter à l’ampleur de la tâche.

A Paris mardi, les marches séparées des travailleurs en grève et des enseignants des écoles professionnelles devraient, selon la police, rassembler plus de 15 000 personnes au total.

Une marche du week-end contre la cherté de la vie appelée par le parti d’opposition La France insoumise (LFI) a vu environ 30.000 personnes descendre dans les rues selon un décompte de la police, alors que les organisateurs ont revendiqué 140.000 personnes.